Dans une décision rendue le 6 septembre 2017, J.T. et CHSLD A (CIUSSS A), 2017 QCTAT 4111, le tribunal administratif du travail s’est penché, en révision judiciaire, sur le cas d’une infirmière qui avait découvert le corps d’un collègue de travail chez lui. Le tribunal a décidé que l’infirmière avait été victime d’un événement imprévu et soudain, survenu à l’occasion du travail et causant un trouble de l’adaptation secondaire à un stress post-traumatique.

Les faits sont les suivants : Un préposé aux bénéficiaires ne s’était pas présenté au travail depuis trois jours et n’avait pas avisé son employeur. Incapable de rejoindre le salarié au téléphone, le préposé à la liste de rappel avait des problèmes d’horaire et de remplacement. Des collègues de travail inquiets, accompagnés de l’infirmière, décidèrent d’aller à la résidence du travailleur, et ce, sur leur heure de dîner.

Comme le temps requis pour se rendre à la résidence à partir du travail était de 45 minutes pour l’aller seulement, l’infirmière avait demandé à sa supérieure immédiate la permission de quitter tout en l’informant qu’elle serait probablement en retard pour le retour.

Une fois arrivés à la résidence du préposé aux bénéficiaires, les quatre collègues n’ont pas obtenu de réponse à la porte.  L’auto du travailleur était stationnée en bordure de la rue. Après avoir composé le 911, et en attendant l’arrivée des policiers, l’infirmière et un collègue firent le tour de la maison et ils aperçurent par la fenêtre le corps inerte du travailleur.

L’infirmière téléphona à sa supérieure immédiate pour l’aviser du dénouement et l’informer qu’ils devaient rester sur place pour collaborer à l’enquête policière suite à la découverte d’une lettre de suicide.

De retour au travail, les quatre collègues étaient sous le choc mais s’efforçaient de continuer à travailler, étant fréquemment confrontés à la mort des patients, mais pas à celle d’un collègue.

Dans les jours suivants, l’infirmière a informé sa supérieure immédiate qu’elle ne dormait presque plus, qu’elle se réveillait en sursaut, faisait des cauchemars et était agitée.

Par la suite, la travailleuse avait de la difficulté à effectuer ses tâches à son rythme habituel.  Son médecin posa un diagnostic de stress post-traumatique et lui prescrivit un arrêt de travail.

Après analyse de tous les faits pertinents, le tribunal conclut que la découverte du corps hors des lieux du travail constituait un événement imprévu et soudain. Le tribunal estimant que les liens d’amitié entre certains employés n’étaient pas suffisants pour classer l’activité dans la sphère strictement personnelle. L’activité d’aller à la résidence du collègue était profitable à l’employeur au niveau de la gestion du personnel et des assignations de travail et pour rétablir un sain climat de travail.

 

Version intégrale de la décision : https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2017/2017qctat4111/2017qctat4111.pdf